Le Gypaète Barbu
Son magnifique plumage, son envergure, son rôle dans la chaîne alimentaire montagnarde, son vol magnifique et les programmes de réintroduction… tout concours pour faire du Gypaète un oiseau symbolique de la montagne !
Pourchassé… lui aussi !
Comme le bouquetin qui a frôlé la disparition mais aussi le loup ou le renard, le corbeau, le blaireau et tant d’autres, le Gypaète Barbu s’est retrouvé dans la ligne de mire…
Jusqu’à totalement disparaître des Alpes à la fin du XIXe siècle. Victime des phantasmes humains qui, par ignorance, lui ont taillé un costard de bête démoniaque histoire de se donner une « bonne » excuse pour lui faire la peau (ou plutôt la plume !).
Un magnifique vautour
D’une envergure impressionnante (jusqu’à trois mètres ! ), il est un des plus grands vautour de France avec le vautour moine. Le rencontrer au détour d’un chemin reste une expérience unique…
Poitrail orangé, queue en losange, rémiges digités et oeil cerclé de rouge sans oublier la petite barbichette qui orne la base de son bec, voilà le portrait rapide de l’artiste, un des plus grands rapaces d’Europe.
La reconquête
En 1922, une première demande de réintroduction sera demandée par le Suisse Carl Stemmler. Mais celle-ci restera lettre morte. Il faudra attendre 50 ans pour qu’en 1972 un premier oiseau prélevé en Asie soit réintroduit dans les Alpes. Mais là aussi, ce sera un échec.
Six ans plus tard, en 1978, après un élevage au zoo d’Innsbruck, en Autriche, des jeunes oiseaux naissent en captivité. Le projet international de réintroduction du Gyapaète prend alors lui aussi son envol.
En 1986, les premiers Gypaètes sont relâchés dans la vallée du Rauris en Autriche. La même année, l’unique centre d’élevage de jeunes est créé en France et sera géré par Asters. L’année suivante, un deuxième site est choisi dans le massif du Bargy, en Haute-Savoie, pour la réintroduction des premiers Gypaète en France.
En 1991, le Parc National Suisse d’Engadine accueil le troisième site de réintroduction. En 1992, l’organisme international Foundation for Conservation of the Bearded Vulture prend la direction des opérations de réintroduction.
Puis en 1993, le Parc National du Mercantour et le Parc Italien voisin d’Alpi Marittime deviennent le quatrième site de réintroduction.
En 1997, la première naissance de jeunes Gypaètes naturel est célébrée dans le massif alpin du Bargy, pratiquement un siècle après sa dispatition.
En 2010, c’est le Parc Naturel Régional du Vercors qui accueille le cinquième site de réintroduction, pour favoriser les échanges avec les populations pyrénéennes.
Et aujourd’hui…
Vingt cinq ans après la première réintroduction dans les Alpes on estime que la population de Gypaète Barbu sur l’ensemble de l’arc alpin représente environ 170 individus et 18 couples reproducteurs.
On dénombre plus précisément 3 couples en Haute-Savoie situés dans le massif du Bargy, à Sixt et dans le massif des Aravis, trois autres couples en Savoie et enfin un couple dans les alpes de Haute-Provence. On dénombre par ailleurs 5 couples en Italie, 4 en Suisse et 2 en Autriche.
En juin 2011, le Parc Naturel du Vercors accueillera un poussin de quelques semaines.
Survivre !
Une fois relâché dans la nature ou, encore mieux, issu d’un couple reproducteur, le jeune poussin Gypaète n’est qu’au début d’un combat pour la survie. Haut perché dans une falaise, au creux d’une cavité abrité, le poussin perce sa coquille en plein hiver, durant le mois de février. Il pèse alors 150 grammes tout mouillé !
Mais trois mois plus tard il aura atteint sa taille adulte… Ses parents sont à la tâche pour nourrir le rejeton dont l’appétit est gagantuesque.
À 4 mois le jeune gypaète sera capable de prendre son envol. Jusqu’à l’automne, l’entraînement aux techniques de vol et à la recherche de nourriture se poursuivra sous la houlette des ses parents.
Et aux premiers frimas il devra quitter définitivement le nid familiale pour laisser la place à la génération suivante.
Casseur d’os
Le Gypaète est un charognard exclusif. Il prospecte la montagne et grâce à son excellente vue il repère les carcasses d’animaux morts. Il avale alors les os d’un coup ou, quand ceux-ci sont trop volumineux, il les emmènent dans les airs pour les lâcher au-dessus d’un pierrier sur lequel ils iront se briser en plusieurs morceaux. Le Gypaète n’a plus alors qu’à festoyer !
Son rôle de charognard est très important puisqu’il participe ainsi au nettoyage de la montagne, empêche la propagation de maladies ou parasites et la pollution des cours d’eau et nappes phréatiques.
Revers de la médaille, le Gypaète se trouvant ainsi au sommet d’une chaîne alimentaire, il concentre dans son organisme tous les polluants et toxiques qui s’accumulent au long de cette chaîne pour atteindre des concentrations maximums dans son organisme.
Une vie au long cours
Après 5 ou 6 années passées à explorer les montagnes, le Gypaète va cherche à se sédentariser et à former un couple. Il installe un nid à l’abri d’une falaise pour abriter deux œufs chaque année. Un seul poussin sera élevé. Le second ne sera pris en charge que si le premier ne survie pas…
La population de Gypaète dépend ainsi d’un taux de reproduction faible et d’une longévité élevé des individus adultes. Ceux-ci vivent en moyenne une trentaine d’année, avec un taux de survie de l’ordre de 95%, une fois passé les 5 à 6 premières années critiques. Le taux d’accroissement des populations est donc très lent. Et la moindre surmortalité, souvent d’origine accidentelle, est un coup dur pour la survie de l’espèce !
Ainsi, les kilomètres de câbles et filins de toutes sortes qui encombrent nos vallées sont des pièges redoutables : le regard fixé au sol à la recherche de sa nourriture, il ne verra ces obstacles que trop tard…
Une réussite collective !
La recolonisation de l’arc alpin par ce magnifique vautour est un succès mais l’avenir n’est pas garanti. La poursuite des programmes d’élevage et de réintroduction est une nécessité compte tenu de la lenteur d’accroissement de la population de Gypaète : un jeune à l’envol en moyenne tous les trois ans…
Mais la surveillance et le suivi des populations est aussi essentiel. On dénombre environ 300 « vigies », professionnelles ou bénévoles, qui assurent le suivi de la population du Gypaète !
Pourquoi pas vous !?